Nous nous proposons d’analyser ci-après si la médiation commerciale peut permettre aux parties de régler un conflit matériel en faisant abstraction des émotions, sans tension, ni investissement en temps supplémentaire.
Nous aborderons tout d’abord le prétendu « modèle de médiation juridique » et son « principe d’objectivité » (I.), nous nous interrogerons ensuite sur le postulat des parties prenant une décision rationnelle (II.) et le soumettrons à une appréciation critique sous l’angle psychologique (III.) avant d’en tirer des conclusions pour la médiation commerciale (IV.).
I. Le modèle de médiation juridique et le prétendu principe d’objectivité
Leo Montada et Elisabeth Kals constatent que « dans la pratique de la médiation, les émotions tendent plutôt à être passées sous silence au lieu d’être articulées et mises à profit dans une perspective productive ». On estime « pouvoir objectiver le conflit et donc le processus de médiation en niant les émotions »1. La méthode juridique de la gestion des conflits exigerait qu’à partir de la réalité complexe, l’« objectivation », c’est-à-dire la réalisation d’une passerelle sélective entre la réalité et un état de fait formulé en termes abstraits, légaux ou contractuels, mette en lumière des droits pour les parties. En faisant prévaloir ces droits lors de litiges portés devant la justice qui, comme les accords transactionnels, suivraient un jeu à somme nulle, les avocats représenteraient les (prétendus) « intérêts » de leurs clients2. « Dans la méthode juridique de règlement des conflits, les émotions entravent l’objectivation de la réalité ainsi que l’identification et l’examen des droits des parties »3. En matière de médiations, actuellement dominées par les juristes, L. Montada et E. Kals distinguent en conséquence « le modèle de médiation juridique » et une « médiation d’approche psychologique » qui, en utilisant des connaissances psychologiques empruntées notamment à la psychologie de la communication, de la motivation et de l’émotion, dépasserait la méthode juridique dans la mesure où son succès ne se mesurerait pas au seul critère objectif de l’obtention d’un accord extrajudiciaire4. L. Montada et E. Kals attribuent ce « refoulement des émotions et leur proscription dans de nombreux modèles de médiation » à un « principe d’objectivité » provenant5 de la « théorie du choix rationnel » (« rational-choice-theory »), c.-à-d. de l’hypothèse implicite, voire occasionnellement explicite, selon laquelle le motif de conflit dominant des parties serait la maximisation de leur avantage personnel, l’intérêt propre, l’égoïsme6. Ils critiquent certes les médiations ne laissant pas de place aux émotions, mais ils n’analysent pas les différentes théories et n’établissent pas de corrélations.
II. Le postulat des parties prenant une décision rationnelle
Le postulat des parties impliquées dans un conflit commercial prenant une décision rationnelle, à motivation unique (A.) suppose une action responsable et autodéterminée de ces dernières (B.) qui tient à son tour à la notion de conflit (C.) qu’elles peuvent appliquer au conflit matériel.
A. L’intérêt propre des parties
L’hypothèse selon laquelle les parties impliquées dans un processus de médiation agissent généralement par intérêt propre, prédominant dans toute négociation, renvoie à la « théorie du choix rationnel » (« rational-choice-theory »)7. « Egoïste rationnel » (« homo oeconomicus »), chaque individu rechercherait dans les interactions sociales la solution la plus avantageuse pour lui-même8. L. Montada et E. Kals critiquent cette « théorie du choix rationnel » (« rational-choice-theory ») dans une perspective essentiellement théorique, sans examiner de plus près son application aux interactions sociales alors que la « théorie du choix rationnel » (« rational-choice-theory ») constitue l’élément fondamental de la « théorie des jeux » (« game-theory ») qui tente de déduire le comportement décisionnel rationnel des parties dans les situations conflictuelles en société9. Illustration notoire de la théorie des jeux, le « dilemme du prisonnier » (« prisoner’s dilemma »)10, également appelé « dilemme de la négociation »11, enseigne ainsi que deux individus se témoignant une confiance mutuelle parviendront à une solution plus avantageuse pour les deux parties que s’ils ne se font pas confiance et ne communiquent pas. Ce dilemme montre que deux prisonniers qui n’ont pas la possibilité de communiquer, ni de se concerter tendront à préférer la solution la plus avantageuse pour eux personnellement, mais qui s’avère néanmoins ne pas être globalement la meilleure. Contrairement à ce que pensent L. Montada et E. Kals, l’application théorique de la « théorie du choix rationnel » (« rational-choice-theory ») aux situations conflictuelles dans le dilemme du prisonnier ne représente précisément pas une « réduction de toute action à l’intérêt propre » des deux parties en conflit, ni l’« hypothèse d’un motif unique ». Le dilemme du prisonnier montre au contraire que la communication et la confiance peuvent motiver les parties en conflit à trouver des solutions beaucoup plus intéressantes pour toutes les deux, au-delà de leurs prétendus intérêts propres12. Aussi convient-il d’y revenir en considérant trois aspects psychologiques (III. ci-après).
B. La condition de l’action autodéterminable des parties
Le postulat des parties en conflit prenant des décisions rationnelles tout en poursuivant leur intérêt propre suppose tacitement que les parties soient en soi capables d’agir de manière responsable. Sans la conviction des parties de pouvoir agir de façon responsable au sens de l’objectif de médiation du « projet d’autonomie des parties » (« party-autonomy-project »)13, une partie en conflit ne pourrait même pas décider rationnellement. Cet objectif est à son tour lié à la notion de conflit utilisée pour expliquer le conflit matériel dans la mesure où p. ex. les conflits justifiés par des motifs biologiques pourraient exclure une action autodéterminable des parties14, mais ne sauraient exclure les émotions.
C. Le recours à la notion de conflit des parties
Pour agir de manière rationnelle et autodéterminée, les parties impliquées dans un conflit doivent donc réfléchir à la notion de conflit. Selon les théories des conflits, les conflits ont leur origine dans l’inégalité de la répartition verticale (K. Marx) ou horizontale (M. Weber) du pouvoir et de la richesse et dans les structures du pouvoir ou les appartenances sociales y afférentes (G. Simmel), c.-à-d. dans les structures sociales (théories sociologiques des conflits). Les conflits peuvent également être conditionnés par le principe naturel de la sélection (Darwin) (théorie biologique des conflits) ou se révéler être l’expression de la contradiction entre les attentes sociales normatives et les besoins individuels de la personne (théorie psychanalytique de conflit). Ainsi, si l’on considère les causes de conflits, les conflits matériels vont régulièrement de pair avec des conflits émotionnels. Les conflits matériels sans conflits émotionnels semblent tout aussi peu imaginables lorsque les structures sociales et de pouvoir sont à l’origine de conflits que lorsque des conflits naissent de la sélection et encore moins dans le cas où les besoins personnels et les exigences sociales s’opposent. Si les conflits matériels ne sont pas déclenchés par des conflits émotionnels, ils s’accompagnent au minimum d’un conflit émotionnel, pour les causes décrites par les théories des conflits15. Nous nous proposons à présent de porter un regard critique sur l’action prétendument rationnelle des parties à la lumière de la psychologie de l’émotion, de la communication et de la motivation (III. A., B. et C.).
III. Remise en cause critique du postulat des décisions rationnelles des parties
Certains aspects du dilemme du prisonnier (point II.A. ci-dessus) et des théories des conflits (point II.C. ci-dessus) font référence à la psychologie comme la science du vécu et du comportement des hommes16 et en particulier à la psychologie de l’émotion (A.), de la communication (B.) et de la motivation (C.). Elles montrent que l’action humaine est marquée et motivée par de nombreuses circonstances extérieures et intérieures et qu’elle ne se limite pas à une action rationnelle et responsable de la partie en conflit centrée sur l’égoïsme selon la « théorie du choix rationnel » (« rational-choice-theory ») à la lumière du « projet d’autonomie des parties » (« party-autonomy-project »).
A. En raison de la psychologie de l’émotion
Les émotions auraient avant tout une fonction motivante, sociale et cognitive, elles seraient des déclencheurs d’action et centreraient le comportement humain sur des objectifs spécifiques (point III.C. ci-après)17. Les émotions serviraient souvent à réguler les interactions sociales, notamment pour ce qui est de la communication sociale consciente et inconsciente (point III.B. ci-après). Enfin, la fonction cognitive des émotions influencerait l’apprentissage, la mémoire et la créativité 18, un élément utile lors de la recherche de solutions créatives en médiation. La psychologie de l’émotion explique comment naît une « émotion »19, éclaire l’éclosion des sentiments, qui sont virulents dans les conflits et peuvent faire obstacle à leur résolution, et offre des possibilités pour comprendre et modifier les sentiments de tension20. Les émotions en tant que « modèle complexe de changements qui englobe l’excitation physiologique, les sentiments, les processus cognitifs et les comportements » en réaction à des situations qu’un individu perçoit comme étant importantes pour lui personnellement21, joueraient non seulement un rôle central dans le développement des conflits et le déroulement des conflits, mais aussi lors de leur résolution22. Les émotions pourraient « être considérées comme des réactions irrationnelles qui feraient obstacle à une appréciation objective d’une situation et à sa maîtrise. De plus, les émotions seraient perçues comme des événements négatifs que l’homme « subit » passivement, c’est-à-dire qui apparaissent sans qu’il y contribue et qui sont plus ou moins en dehors de tout contrôle conscient »23. Elles seraient intéressantes sur le plan du diagnostic car elles montrent ce qui est important pour quelqu’un24. Les émotions pourraient occulter aussi le regard d’une partie vers une perception plus objective de l’action de l’autre partie en conflit25. Alors que l’on s’attacherait aux émotions dans les médiations des relations proches, il en serait autrement lorsque la proximité des parties est moins grande. L. Montada et E. Kals constatent en effet que « même si un conflit est présenté comme étant un conflit matériel, il s’agit souvent d’un conflit au niveau de la relation »26. La survenance d’émotions lors de la survenance d’un conflit est selon nous d’ores et déjà ancrée dans les théories des conflits (point II.C. ci-dessus) selon lesquelles l’apparition d’un conflit matériel exempt d’émotions, qui ne sont pas nécessairement de nature irrationnelle, est difficilement imaginable. Les motifs et le contenu des sentiments varieraient en fonction de chaque cas considéré. S‘agissant des questions environnementales, les sentiments porteraient par exemple sur l’objet du conflit alors qu’ils viseraient la partie adverse dans d’autres conflits.27.
B. En raison de la psychologie de la communication
Les émotions servent de régulateur aux interactions sociales, notamment en ce qui concerne la communication sociale, consciente ou inconsciente28. On entend par communication l’échange verbal ou non-verbal d’informations codées entre une partie émettrice et une partie réceptrice, qui doit les décoder29. La communication permet aux parties en conflit d’échanger sur leurs émotions et motivations dans le cadre de la médiation. La psychologie de la communication éclaire les malentendus de la communication et propose des voies pour favoriser la compréhension mutuelle30. L’action rationnelle, intéressée d’une partie au conflit conformément à la « théorie du choix rationnel » (« rational-choice-theory ») suppose toutefois que cette dernière souhaite communiquer de manière transparente avec l’autre partie. Il semble en soi possible qu’une partie en conflit ne souhaite pas perdre son « ingénuité », son « non-engagement » et ses « qualités dissimulées » au cours des négociations et qu’elle préfèrera négocier d’une manière « non-transparente »31, sans renoncer à son « jardin secret ». La décision de savoir si une partie en conflit communiquera et de quelle manière elle le fera (« On ne peut pas ne pas communiquer »32), est donc également influencée par des émotions.
C. En raison de la psychologie de la motivation
Les émotions ont un effet motivant33, mais pas seulement. La motivation désigne des processus qui déclenchent, gèrent ou maintiennent des phénomènes corporels et psychiques.34. Les sources de la motivation sont non seulement les impulsions intérieures, le comportement instinctif mais aussi, chez les êtres pensants, outre les émotions, les attentes35 et les besoins (la pyramide des besoins d’Abraham Maslow)36. Ainsi, il existe un lien entre les émotions et la motivation, qui exclut l’action à motivation unique, intéressée d’une partie au conflit au sens de la « théorie du choix rationnel » (« rational-choice-theory »).
IV. Conclusion pour la médiation commerciale
Il se dégage de la piste de réflexion purement théorique esquissée ci-dessus que l’homme ne se comportera pas nécessairement de manière égoïste dans le cas d’un conflit matériel. Au contraire, les causes des conflits éclairées par les théories des conflits enseignent qu’un conflit émotionnel précède nécessairement un conflit commercial ou va de pair avec celui-ci. Les causes des conflits impliquent pour ainsi dire la survenance de conflits émotionnels (accompagnateurs), qui influent eux-mêmes sur la nature de la communication et de la motivation de chaque partie en conflit. En outre, à la différence de ce que supposent L. Montada et E. Kals37, l‘application de la « théorie du choix rationnel » (« rational-choice-theory ») dans le conflit inter-social du dilemme du prisonnier ou de la négociation comme cas d’étude de la théorie des jeux montre que l’homme n’adoptera pas un comportement intéressé en raison d’une motivation unique, mais que la communication et la confiance peuvent changer les motivations et le comportement des deux parties, même si elles rechercheront ensemble la solution la plus avantageuse pour elles. Cependant, cette dernière n’est pas à motivation unique et centrée sur l’intérêt personnel, mais elle tient compte d’une manière plus complexe des intérêts communs au sens d’une solution « à somme non nulle » (« non-zero-sum ») ou « gagnant-gagnant » (« win-win »). En conséquence, L. Montada et E. Kals constatent à juste titre que « la supposition d’une dominance générale des intérêts personnels dans la motivation de l’individu est fausse… Dans les conflits, l’intérêt personnel est seulement une hypothèse parmi plusieurs. La diffusion et l’importance des orientations de valeur et des motivations de responsabilité et de justice ne doivent pas être sous-estimées »38. On peut théoriquement déduire de l’exposé susmentionné qu’il ne peut y avoir en soi de conflit commercial exempt d’émotions ni de médiation commerciale exempte d’émotions39. Daniel Goleman l’a formulé de la manière suivante : « For better or worse, intelligence can come to nothing when emotions hold sway »40 et « One is an act of the emotional mind, the other of the rational mind. In a very real sense we have two minds, one that thinks and one that feels »41. Aussi est-il difficile d’avancer dans une médiation commercial prétendue rationnelle – ou si l’on réussit à avancer ce ne sera que lentement et péniblement au prix d’un grand investissement en temps – sans tenir compte du vécu des parties et des émotions, également latentes, provenant de ce vécu, tant au niveau de la communication que de leur motivation. Ceci est valable aussi pour le conflit commercial bien qu’il soit « présenté » comme étant « juridiquement sobre ». Ces résultats théoriques confortent l’expérience pratique que l’auteur a acquise au cours des médiations commerciales dans lesquelles les parties dissimulent souvent sous la « structure de surface » du conflit commercial la « structure profonde» émotionnelle latente de celui-ci42. Sans un travail sur la « structure profonde » émotionnelle, les parties ne se débloquent pas et ne parviennent pas, selon mon expérience, à trouver de solutions créatives sur la « structure de surface » du conflit matériel, ou seulement avec beaucoup de difficultés et un grand investissement en temps.
Dr. Martin Hauser, Avocat aux barreaux de Paris et Munich, Médiateur CMAP, BMHAVOCATS, Paris, traduction de l’allemand par Nelly Hervé et Martin Hauser
1 Leo Montada/ Elisabeth Kals, Mediation. Lehrbuch für Psychologen und Juristen, Weinheim 2001, p. 46 – 3.3.2 ; de même Tricia p. Jones/ Andrea Bodtker, Mediating with heart in mind: Adressing emotion in mediation practice. Negotiation Journal 2001, p. 218 ; cf. également l’exposé de Christian Duve, Horst Eidenmüller, Andreas Hacke, Mediation in der Wirtschaft, Cologne 2011, p. 138 : « Dans les milieux économiques, l’opinion qui prévaut est que ce sentimentalisme est irrationnel, négatif et superflu. On doit tout au plus exprimer des sentiments lorsqu’ils se justifient rationnellement… Dans le cas contraire, ils restent l’affaire des enfants et des films de cinéma, dans une perspective masculine peut-être aussi l’affaire des femmes. Certains considèrent l’exposition d’émotions en public comme une faiblesse tactique dans la négociation. Ils estiment que cette sincérité montre leur vulnérabilité ».
2 Leo Montada/ Elisabeth Kals, ibid note 1, p. 24-25 – 2.3.2
3 Leo Montada/ Elisabeth Kals, ibid note 1, p. 46 p. 30 – 2.3.4, p. 44 – 3.3
4 Leo Montada/ Elisabeth Kals, ibid note 1, p. 46 p. 30 – 2.3.4 – 35 – 2.3.5
5 Leo Montada/ Elisabeth Kals, ibid. note 1, p. 44 – 3.3 : « Le modèle du choix rationnel axé sur l’intérêt propre (le modèle du choix rationnel) constitue probablement une deuxième source du principe d’objectivité. La diversité des sentiments humains fondés sur des motifs n’y est pas évoquée dans la mesure où la maximisation de l’intérêt particulier est représentée comme motif unique. La maximisation de l’intérêt particulier s’obtient de préférence par des choix rationnels froids. L’importance des émotions est en tout état de cause non reconnue ou sous-estimée… dans de nombreux modèles de médiation, dans la recherche empirique sur la médiation et dans la pratique de la médiation »..
6 Leo Montada/ Elisabeth Kals, ibid note 1, p. 47 – 3.3.2 – 48 – 3.4
7 Leo Montada/ Elisabeth Kals, ibid note 1, p. 49 – 3.4
8 Leo Montada/ Elisabeth Kals, ibid note 1, p. 50 – 3.4
9 www.de.wikipedia.org/wiki/Spieltheorie: « La théorie des jeux modélise des situations décisionnelles dans lesquelles plusieurs personnes impliquées s’influencent mutuellement. Elle tente ainsi notamment de déduire le comportement décisionnel rationnel dans des situations conflictuelles ».
10 www.de.wikipedia.org/wiki/Gefangenendilemma: Deux joueurs ou prisonniers auraient intérêt à coopérer, mais ils en sont empêchés et en l’absence de communication entre eux, chaque joueur ou prisonnier choisira de trahir l’autre si le jeu n’est joué qu’une seule fois. Dans cette situation, chacun sera condamné à quatre ans de prison (huit ans en tout). Cette situation décrit un état où une stratégie individuelle optimale conduit à un résultat qui n’est pas optimal dans une perspective globale : Deux prisonniers sont soupçonnés d’avoir commis ensemble un délit. Les deux prisonniers sont interrogés dans des pièces séparées et n’ont aucun moyen de se consulter ou d’accorder leur comportement. La peine maximale pour ce délit est de six ans. Si les prisonniers décident de se taire (« coopération »), ils seront condamnés tous les deux à deux ans de prison pour des délits mineurs. En revanche, s’ils avouent tous les deux le délit (« défection »), ils seront tous les deux passibles d’une peine de prison, pas de la peine maximale toutefois, du fait de leur coopération avec les autorités chargées de l’instruction, mais seulement de quatre ans. Si l’un d’eux avoue (« défection ») et que l’autre se tait (« coopération »), le premier sera condamné au titre de témoin-clé à une peine avec sursis symbolique d’un an et l’autre, à la peine maximale de six ans. Dans une matrice, cela donne le tableau suivant, résultat total compris :
11 Christian Duve, Horst Eidenmüller, Andreas Hacke, ibid note 1, p. 59
12 Similaire en termes de résultat, Christian Duve, Horst Eidenmüller, Andreas Hacke, ibid. note 1, p. 62 : « Le dilemme de la négociation renseigne toutefois sur les circonstances favorisant ou entravant le comportement coopératif : communication, échange d’information et confiance sont des conditions importantes pour optimiser les résultats de la négociation ».
13 Cf. à propos des objectifs Stephan Breidenbach/ Ulla Glässer, Selbstbestimmung und Selbstverantwortung im Spektrum der Mediationsziele, ZFM 1999, p. 207-212
14 Cf. à ce propos Martin Hauser, Relevanz des Konfliktverständnisses für die Konfliktanalyse in der Wirtschaftsmediation, ZKM, publication prévue en 2014, chap. I. « Les théories des conflits reposent sur l’hypothèse d’une auto-déterminabilité et autoresponsabilité plus ou moins marquée des acteurs à l’égard des conflits dans lesquels ils sont impliqués. Si, d’après la conception de ces théories des conflits, ceux-ci étaient largement conditionnés par des motifs sociaux ou biologiques et que cette conception soit partagée plus en moins consciemment par les personnes impliquées, il ne serait pas exclu que la conception que les parties en cause ont du conflit ne fasse en soi obstacle à un traitement libre du conflit par les parties sur la voie de la négociation. »
15 De même, mais sans justification et notamment corrélation avec les théories des conflits : Leo Montada/ Elisabeth Kals, ibid. note 1, p. 46 p. 45 – 3.3.1 « On néglige le fait que les émotions font partie intégrante des conflits. Seuls les motifs et le contenu des sentiments varient dans les différents domaines… Même lorsqu’un conflit est présenté comme étant un conflit rationnel, il s’agit souvent finalement d’un conflit au niveau relationnel » ; Tricia S. Jones/ Andrea Bodtker, ibid. note 1, p. 221 : « Les conflits sont définis par l’émotion. La plupart des définitions soutiennent que les conflits surviennent lorsque les personnes perçoivent des objectifs incompatibles ou des interférences mutuelles. Ces événements déclencheurs à l’origine des conflits sont par définition des événements générateurs d’émotions. …Sachant que les déclencheurs d’émotions et les déclencheurs des conflits perçus sont les mêmes, reconnaître que l’on est en conflit, c’est avouer que l’on a été provoqué émotionnellement », p. 223 : « Plutôt que de percevoir l’émotion comme l’effet secondaire d’un conflit, il faut la considérer comme un élément encadrant le conflit, comme une construction sociale à travers laquelle les parties impliquées dans le conflit définissent la réalité de celui-ci »..
16 Philip G. Zimbardo/ Richard J. Gerrig, Psychologie, Berlin 1999, Chapitre 1.3: Aktuelle theoretische Perspektiven, p. 9 – 17 : Il n’existe pas une théorie globale pouvant expliquer le comportement humain dans toute sa diversité et complexité, mais diverses approches. La perspective psycho-dynamique de la psychologie développée par Sigmund Freud expose que l’action humaine peut n’être aucunement marquée par une attention consciente, mais par des motifs irrationnels. Selon la perspective biologique, les causes du comportement humain résident dans les processus électrochimiques du programme génétique de chaque individu. Selon l’approche comportementale, notre action est en grande partie le résultat d’influences environnementales, en réponse à certains stimulants et moins marqué par des motivations intérieures. Dans la perspective cognitive, il est supposé que ce sont les processus du traitement des informations qui déterminent comment un individu se comporte. Ainsi, les hommes ne réagissent pas à la réalité, telle qu’elle peut être décrite objectivement, mais telle qu’elle leur est représentée comme réalité subjective, comme construction de leur propre interprétation du monde. L’approche humaniste, notamment de Carl Rogers et Abraham Maslow, met en avant l’aspiration naturelle de l’individu à la croissance de l’âme et à la santé psychique ainsi qu’au besoin de la réalisation du soi comme étant la logique fondamentale de l’homme. Selon la théorie évolutionniste, le comportement humain s’explique sur la base du processus d’évolution extrêmement long dans le sens de modèles de comportement qui se sont imposés selon le principe de sélection.
17 Philip G. Zimbardo/ Richard J. Gerrig, ibid, note 16, p. 367 – 8.3
18 Philip G. Zimbardo/ Richard J. Gerrig, ibid, note 16, p. 368-369 – 8.2
19 Jürgen H. Otto/ Harald A. Euler/ Heinz Mandl, Emotionspsychologie, Weinheim 2000, p. 15 – 3.: ,,L’émotion est un épisode de synchronisation temporelle de tous les sous–systèmes importants de l’organisme qui forment cinq composantes (la cognition, la régulation physiologique, la motivation, l’expression motrice et le contrôle (monitoring)/sentiment), et qui constitue une réponse à l’appréciation d’un événement irritant extérieur ou intérieur qui est important pour les besoins et objectifs vitaux de l’organisme“; Philip G. Zimbardo/ Richard J. Gerrig, ibid, note 16, p. 364-365 – 8.2
20 Leo Montada/ Elisabeth Kals, ibid, note 1, p. 34 – 2.3.5
21 Philip G. Zimbardo/ Richard J. Gerrig, ibid, note 16, p. 359 – 8.1
22 Leo Montada/ Elisabeth Kals, ibid, note 1, p. 37 – 2.3.5
23 Leo Montada/ Elisabeth Kals, Mediation. Psychologische Grundlagen und Perspektiven, Weinheim 2013, p. 172 – 6.2
24 Leo Montada/ Elisabeth Kals, ibid, note 1, p. 44 – 3.3
25 Keith G. Allred, Anger and retaliation in conflict. The role of attribution. Dans Morton Deutsch & Peter T. Coleman (éditeur.), The handbook of conflict resolution. Theory and practice, San Francisco 2002, p. 241 et suiv.
26 Leo Montada/ Elisabeth Kals, ibid, note 1, p. 45 – 3.3.1
27 Leo Montada/ Elisabeth Kals, ibid, note 1, p. 45 – 3.3.1
28 Cf. ci-dessus III. A., Philip G. Zimbardo/ Richard J. Gerrig, ibid, note 16, p. 368-369 – 8.2
29 Leo Montada/ Elisabeth Kals, ibid, note 23, p. 222 ff – 8.3; cf. Kommunikationsmuster de Marshall B. Rosenberg, Gewaltfreie Kommunikation. Aufrichtig und einfühlsam miteinander sprechen Kommunikatio n ohne Gewalt, Paderborn 2001, p. 21: les quatre composantes de la communication non violente (CNV) : (1) “Observations“, (2) ,,Sentiments“, (3) ,,Besoins“ et (4) ,,Sollicitations“; Friedemann Schulz von Thun, Miteinander Reden 1. Störungen und Klärungen. Allgemeine Psychologie der Kommunikation, Reinbeck 1992, p. 44 et suiv.: (1) ,,Sachinhalt – Sach-Ohr“ (Contenu rationnel– Oreille rationnelle“), (2) ,,Selbstoffenbarung – Selbstoffenbarungs-Ohr“ (,,Autorévélation – Oreille d’autorévélation“), (3) ,,Beziehung zum anderen – Beziehungs-Ohr“ (« Relation avec l’autre – Oreille relationnelle“) , (4) ,,Appell – Appell-Ohr“ (,,Appel – Oreille d’appel“).
30 Leo Montada/ Elisabeth Kals, ibid, note 1, p. 33 – 2.3.5
31 Eberhard Stahl, Lob der Intransparenz. Dans : Friedemann Schulz von Thun/ Dagmar Kumbier. Impulse für Kommunikation im Alltag: Kommunikationspsychologische Miniaturen 3. Reinbeck 2010, p. 206-233
32 Paul Watzlawick/ Janet H. Beavin/ Don D. Jackson, Menschliche Kommunikation: Formen, Störungen und Paradoxien, Berne 2000, p. 51
33 Philip G. Zimbardo/ Richard J. Gerrig, ibid, note 16, p. 367 – 8.3: « Les émotions ont une fonction motivante car elles forcent à agir face à un événement réellement vécu ou imaginé. Les émotions orientent alors le comportement sur des objectifs spécifiques et le maintiennent en vie…. Les émotions peuvent également donner un feedback sur le propre état motivationnel ».
34 Philip G. Zimbardo/ Richard J. Gerrig, ibid, note 16, p. 319 – 7.1
35 Philip G. Zimbardo/ Richard J. Gerrig, ibid, note 16, p. 320 ff – 7.1.2
36 Philip G. Zimbardo/ Richard J. Gerrig, ibid, note 16, p. 324 – 7.1.3 : Bizarrement, les auteurs ne mentionnent pas spécifiquement les émotions parmi les prétendues « Sources de motivation », à moins qu’elles ne soient comprises dans les « attentes » et les « besoins » cités, mais ils le font explicitement à un autre endroit p. 367 – 8.3: « Les émotions ont une fonction motivante car elles forcent à agir face à un événement réellement vécu ou imaginé. Les émotions orientent alors le comportement sur des objectifs spécifiques et le maintienne en vie…. Les émotions peuvent également donner un feedback sur le propre état motivationnel ».
37 Ils limitent leur analyse au postulat de la théorie de choix rationnel (« rational-choice-theory ») comme étant une théorie à-motivation unique, centrée sur l’intérêt individuel de la partie en conflit sans l’avoir remis en question comme pour le dilemme du prisonnier dans une situation de conflit inter-sociale.
38 Leo Montada/ Elisabeth Kals, ibid, note 1, p. 37
39 Voir aussi Thierry Garby, La Gestion des conflits, Paris 2004, p. 3, 64, 70, 84, 88, qui ne pose pas expressément la question d’une solution de conflit avec ou sans émotions notamment dans le domaine économique, mais qui ne laisse subsister aucun doute dans ses commentaires quant à la présence de notions de psychologie dans la formation des médiateurs et que les émotions peuvent (contribuer à) déclencher des conflits et que leur gestion fait partie intégrante de la médiation car des « facteurs psychologiques » peuvent entraîner un blocage au niveau de la négociation ; similaire en termes de résultat Christian Duve, Horst Eidenmüller, Andreas Hacke, ibid, note 1, p. 137
40 Daniel Goleman, l’Intelligence émotionnelle, New York 1995, p. 27
41 Daniel Goleman, ibid, note 40, p. 32
42 Leo Montada/ Elisabeth Kals, ibid, note 23, p. 52 à propos de la « structure de surface et de la structure profonde des conflits ».