A la faveur de la crise sanitaire et de nouvelles habitudes de consommation, le « quick commerce » c’est-à-dire la livraison, dans un délai extrêmement bref, de commandes effectuées en ligne, s’est fortement développé dans les grandes villes de France.
Un tel modèle nécessite l’installation d’espaces dédiés au stockage et à la préparation au cœur de quartiers denses en termes de population. Ces entrepôts, appelés dark stores, se sont notamment implantés en lieu et place d’anciens magasins des centres-villes n’ayant pas survécu à la pandémie.
Tandis que les drives, définis par l’article L. 752-1, 7° du Code de commerce comme des « point permanent de retrait par la clientèle d’achats au détail commandés par voie télématique » sont soumis à autorisation d’exploitation commerciale, les dark stores, qui n’accueillent pas de clientèle, en sont dispensés1.
En revanche, sous peine de sanctions, l’ouverture des dark stores doit être effectuée dans le respect des règles d’urbanisme2.
La construction d’un nouveau bâtiment destiné à accueillir un tel entrepôt3 ou la transformation d’un magasin existant en dark store, qui constitue un changement de destination au sens de l’article R. 421-17 du Code de l’urbanisme4, est soumise à permis de construire lorsqu’elle s’accompagne d’une modification des structures porteuses ou de la façade du bâtiment5 ou, à défaut, à déclaration préalable6.
Les collectivités territoriales et les établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) peuvent, par ailleurs, inclure dans leurs documents d’urbanisme (plan local d’urbanisme (PLU), plan local d’urbanisme intercommunal (PLUi), schéma de cohérence territoriale (SCoT)) des dispositions destinées à encadrer l’implantation de dark stores sur leur territoire :
- Le règlement d’un plan local d’urbanisme peut notamment « préciser l’affectation des sols selon les usages principaux qui peuvent en être faits ou la nature des activités qui peuvent y être exercées » et « définir, en fonction des situations locales, les règles concernant la destination et la nature des constructions autorisées»7. Il peut également « identifier et délimiter les quartiers, îlots et voies dans lesquels est préservée ou développée la diversité commerciale, notamment à travers les commerces de détail et de proximité, et définir, le cas échéant, les prescriptions de nature à assurer cet objectif » et « délimiter, dans les zones urbaines ou à urbaniser, des secteurs dans lesquels la préservation ou le développement d’infrastructures et d’équipements logistiques est nécessaire et définir, le cas échéant, la nature de ces équipements ainsi que les prescriptions permettant d’assurer cet objectif »8.
- En l’absence de SCoT, les orientations d’aménagement et de programmation (OAP) des PLUi doivent désormais contenir des « orientations relatives à l’équipement commercial, artisanal et logistique» et déterminer « les conditions d’implantation des équipements commerciaux, artisanaux et logistiques qui, du fait de leur importance, sont susceptibles d’avoir un impact significatif sur l’aménagement du territoire et le développement durable »9.
- Depuis la loi no 2021-1104 du 22 août 2021 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets, les SCoT doivent contenir un « document d’aménagement artisanal, commercial et logistique déterminant les conditions d’implantation des équipements commerciaux qui, en raison de leur importance, sont susceptibles d’avoir un impact significatif sur l’aménagement du territoire, le commerce de centre-ville et le développement durable»10. Ce document détermine « les conditions d’implantation des constructions commerciales et des constructions logistiques commerciales en fonction de leur surface, de leur impact sur l’artificialisation des sols et de leur impact sur les équilibres territoriaux, notamment au regard du développement du commerce de proximité, de la fréquence d’achat ou des flux générés par les personnes ou les marchandises »11.
L’obtention des autorisations d’urbanisme requises nécessitent donc une analyse préalable des règles locales.
Par ailleurs, l’exercice de cette activité est soumis au respect des règles européennes, nationales ou locales applicables en matière de concurrence, réglementation du commerce de produits alimentaires, baux commerciaux, économie numérique, droit du travail, publicité extérieure, propriété intellectuelle, ….
toutes activités que nous connaissons bien, chez BMH AVOCATS.
Catherine Nelken, Laurence Duriez
1 Conseil constitutionnel, 13 août 2021, décision no 2021-825 DC
2 Article L. 480-4 du Code de l’urbanisme
3 Article R. 421-1 du Code de l’urbanisme
4 Aux termes de l’article R. 151-28 du Code de l’urbanisme, les magasins relèvent de la destination « commerce et activités de services » tandis que les entrepôts, définis comme « les constructions destinées au stockage des biens ou à la logistique » par l’article 4 de l’arrêté du 10 novembre 2016 relèvent de la destination « Autres activités des secteurs secondaire ou tertiaire ».
5 Article R. 421-14, c) du Code de l’urbanisme
6 Article R. 421-17, b) du Code de l’urbanisme
7 Article L. 151-9 du Code de l’urbanisme
8 Article L. 151-16 du Code de l’urbanisme
9 Article L. 151-6 du Code de l’urbanisme
10 Article L. 141-6 du Code de l’urbanisme, premier paragraphe
11 Article L. 141-6 du Code de l’urbanisme, second paragraphe