1. L’instauration du comité social et économique (CSE) en lieu et place des institutions existantes
Une instance unique et obligatoire pour toutes les entreprises
Après plusieurs réformes successives du dialogue social, le système pluri-institutionnel de représentation du personnel à la française (D.P, C.H.S.C.T, C.E) aura complètement disparu fin 2019. Trois instances aux domaines d’actions normalement bien définis, mais qui avaient souvent tendance à traiter des mêmes sujets.
Certes, une délégation unique du personnel (DUP) pouvait être mise en place, mais celle-ci restait optionnelle et était réservée aux entreprises d’une certaine taille.
La fusion de tous les organes actuels en une institution unique appelée le comité social et économique (CSE), doit impérativement être mise en œuvre avant le 1er janvier 2020, et ce dans toutes les entreprises de 11 salariés et plus.
La réponse aux problématiques remontées par les chefs d’entreprise
Cette modernisation répond à une demande ancienne des chefs d’entreprise. Elle permet :
- l’atténuation de « l’effet de seuil » au-delà de 50 salariés, en évitant les nombreuses obligations financières et sociales qui constituent actuellement un frein à l’embauche pour de nombreuses entreprises ;
- une baisse générale des coûts (éviter le cumul des mandats par les mêmes représentants du personnel ; baisse du nombre de représentants, et corrélativement du nombre d’heures de délégation ; probable baisse du nombre de réunions) ;
- la baisse du nombre d’interlocuteurs à même de fluidifier les échanges entre les représentants des salariés et les dirigeants d’entreprise.
Une institution unique mais une modulation des attributions en fonction de la taille de l’entreprise
La réforme veille néanmoins à ne pas alourdir les obligations des employeurs des petites entreprises. Ainsi, dans les entreprises de moins de 50 salariés, le CSE n’aura pas de personnalité morale et exercera des attributions dites « réduites », reprenant pour majeure partie les attributions anciennement confiées aux délégués du personnel.
Dans les entreprises de 50 salariés et plus, le CSE aura des prérogatives plus étendues, puisqu’il reprend en son sein les responsabilités et les missions dévolues aux anciens CHSCT et CE. Les élus vont donc avoir l’opportunité de gagner en compétence et aussi en polyvalence afin de traiter de tous les thèmes (économie, orientations stratégiques, conditions de travail, santé).
Place au dialogue social pour un CSE sur-mesure
Synonyme de simplification et d’efficacité, une large place est laissée à la négociation afin de permettre aux partenaires sociaux d’adapter le fonctionnement de l’institution en fonction des nécessités des entreprises. Un dialogue social de qualité et une analyse réfléchie sur les besoins internes permettront sans nul doute aux entreprises d’établir un CSE sur-mesure.
2. Tableau synthétique des institutions avant et après la réforme : nouveautés et continuité
3. Tirer profit des nouvelles règles de négociations dans mon entreprise
Le fonctionnement de l’instance peut être aménagé dans chaque entreprise afin de renforcer l’efficacité du dialogue social (A) en vue de flexibiliser le droit du travail par la conclusion d’accords d’entreprise dérogatoires « gagnant -gagnant » répondant aux besoins opérationnels (B).
A. Instauration d’un CSE sur-mesure
La remise à plat de tous les accords d’entreprise relatifs aux anciennes instances représentatives du personnel
Dans le cadre de la mise en place du CSE, tous les accords d’entreprise relatifs aux anciennes instances représentatives du personnel sont caducs. A défaut de nouvel accord, les dispositions légales s’appliquent de plein droit dès la mise en place du CSE.
A défaut d’accord, des dispositions légales plus favorables qu’auparavant
Or, les nouvelles dispositions légales sont moins favorables pour les instances représentatives du personnel : baisse du nombre de mandats, nombre de mandats successifs limité à 3, rôle du suppléant limité au remplacement des titulaires, sollicitation croissante du budget de fonctionnement du CSE en raison de l’extension de la règle du partage des coûts de l’expertise.
Une marge de négociation pour l’employeur renforcée
Par conséquent, les élus seront beaucoup plus disposés à la négociation qu’auparavant. L’employeur devra ainsi s’en prévaloir dans une logique « gagnant-gagnant » afin de flexibiliser encore d’avantage le dialogue social et le fonctionnement du CSE au sein de son entreprise.
La liste ci-dessous indique les principaux aménagements possibles du CSE par accord collectif majoritaire :
- mise en place des « représentants de proximité » afin d’assurer une représentation du personnel au plus proche du terrain ;
- aménagement de la présence des suppléants à certaines réunions ou certaines commissions afin de permettre aux membres suppléants de s’impliquer dans leur rôle de représentant du personnel et de les familiariser au fonctionnement de l’instance ;
- réduction du nombre de réunions : sous réserve de respecter un minimum de 6 réunions annuelles ;
- détermination du nombre et du périmètre des établissements distincts, permettant de mettre en place un CSE unique au niveau de l’entreprise ou au contraire d’organiser une gestion des instances représentatives du personnel selon les besoins propres à chaque établissement (sous réserve d’une autonomie de gestion suffisante) ;
- fixation du budget de fonctionnement des actions sociales et culturelles ;
- définition du contenu des informations et consultations ponctuelles ;
- modalités de ces consultations ponctuelles, et notamment le nombre de réunions ;
- réduction des délais pour donner un avis (auparavant : délai plancher de 15 jours) dans le cadre des consultations ponctuelles à condition que le délai laissé au CSE lui permette d’exercer utilement sa compétence, en fonction de la nature et de l’importance des questions qui lui sont soumises ;
- négociation du contenu de la BDES[4].
B. Structurer les normes d’entreprise selon les besoins opérationnels
L’élaboration d’accords d’entreprise « gagnant / gagnant » est la clé pour flexibiliser les normes de droit du travail français et améliorer la compétitivité des entreprises.
Principe de primauté de l’accord d’entreprise
Les ordonnances Macron élargissent le domaine de primauté de l’accord d’entreprise sur l’accord de branche, permettant ainsi aux entreprises d’adapter certaines réglementations à leurs exigences spécifiques de fonctionnement :
Faciliter les restructurations par la conclusion d’accords collectifs
Enfin, indépendamment de ces trois blocs, les mesures de « restructuration » sont grandement facilitées lorsqu’elles ne sont pas conditionnées à la conclusion d’un accord collectif d’entreprise. Les difficultés économiques, autrefois exigées pour procéder aux changements nécessaires, ne sont plus nécessairement requises. Une des mesures phares de la réforme Macron, appelée rupture conventionnelle collective, permet à l’employeur de négocier avec les syndicats un nombre de départs et les conditions afférentes.
Plus simple, moins coûteux et davantage sécurisé sur le plan juridique, le champ de négociation des employeurs est désormais considérablement élargi.
Dr. Aymeric Le Goff, Alizée Poncet
[1] Comité d’Entreprise
[2] Comité d’Hygiène, de Sécurité, et des Conditions de Travail
[3] Délégation Unique du Personnel
[4] Base de données économiques et sociales : outil qui permet de rassembler les informations nécessaires aux consultations récurrentes des instances représentatives du personnel.